Procédure disciplinaire
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- Procédure disciplinaire
L’Ordre des pharmaciens est compétent pour élaborer et faire respecter les règles de la déontologie pharmaceutique. Il peut ainsi réprimer disciplinairement toute atteinte à l’honneur et à la dignité de la profession commise par un de ses membres. L’objectif est d’assurer la qualité et la sécurité des services et prestations offerts par les pharmaciens, au bénéfice de la santé publique et de la société dans son ensemble.
Le pouvoir juridictionnel disciplinaire appartient, au sein de l’Ordre des pharmaciens, aux dix Conseils provinciaux (en première instance), ainsi qu’au Conseil d’appel et au Raad van Beroep (en degré d’appel). Un pourvoi est également possible auprès de la Cour de cassation en dernier ressort.
Remarques préalables
1. La procédure disciplinaire qui peut se dérouler au sein de l’Ordre des pharmaciens est propre aux pharmaciens inscrits au tableau
(qu’ils soient pharmaciens d’officine, pharmaciens hospitaliers, biologistes cliniciens, professeurs…) et uniquement à ceux-ci. Ainsi, les étudiants ou certains pharmaciens d’industrie qui ne sont pas inscrits au tableau ne peuvent être attraits devant les juridictions disciplinaires de l’Ordre.
2. Les règles de déontologie s’imposent aux pharmaciens inscrits au tableau de l’Ordre des pharmaciens dans le cadre de leur activité professionnelle, peu importe la nature de cette activité (analyses de biologie clinique ou activité en pharmacie hospitalière ou ouverte au public), et lorsqu’applicable, peu importe le type de produits délivrés (médicaments ou produits dits de parapharmacie) ou le lieu de délivrance (dans la pharmacie, à domicile dans les hypothèses exceptionnelles prévues par la loi ou en ligne). Les règles de déontologie s’imposent également aux pharmaciens en dehors de leur activité professionnelle : des comportements de nature privée pourront donner lieu à des poursuites disciplinaires en fonction des répercussions possibles sur la perception du pharmacien par la patientèle.
3. La procédure disciplinaire est indépendante et autonome par rapport aux autres types de procédures – pénale, civile, administrative – qui pourraient être initiées sur base d’un même comportement d’un pharmacien.
Déroulement de la procédure disciplinaire
La procédure disciplinaire au sein de l’Ordre des pharmaciens passe potentiellement par trois instances : le Conseil provincial en première instance ; le Conseil d’appel en degré d’appel ; la Cour de cassation – qui n’est pas un organe de l’Ordre, mais appartient au système judiciaire classique – en cas de pourvoi en cassation.
Les principales étapes de la procédure disciplinaire sont résumées dans la figure suivante.
a) Saisine
Tout commence donc au niveau du Conseil provincial auquel est inscrit le pharmacien concerné au moment de la plainte ou de l’initiation de la procédure. Ce Conseil provincial reste compétent tout au long de la procédure.
Une procédure disciplinaire peut débuter de diverses manières :
- Le Conseil provincial peut se saisir d’office de certains faits dont il aurait eu connaissance ;
- Le Conseil provincial peut agir à la requête d’une autorité (Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, inspection de la pharmacie, Commission médicale provinciale, Procureur du Roi…) ;
- Le Conseil provincial peut agir à la suite de la plainte d’un tiers (autre pharmacien, patient, société…).
Dans le cas de la plainte, le plaignant n’est pas partie à la cause : il peut être certain que l’affaire fera l’objet d’un suivi, mais il ne sera pas informé de l’état d’avancement ou de l’issue de la procédure.
b) Phase 1 : instruction
La première phase de la procédure disciplinaire devant le Conseil provincial est la phase d’instruction.
Une fois le Conseil provincial saisi d’une affaire, il va la transmettre à son Bureau afin que celui-ci la mette à l’instruction. Le Bureau désigne une ou plusieurs personnes au sein du Conseil provincial afin d’instruire, à charge et à décharge, conjointement avec le magistrat-assesseur.
L’instruction est la phase durant laquelle on va tenter de réunir les différents éléments nécessaires (documents, témoignages, interrogatoires…) afin de mettre une affaire en état d’être jugée. Les moyens mis à la disposition des instructeurs durant leur instruction sont limités (par exemple, pas de possibilité de faire prêter serment aux personnes entendues, pas de perquisition ou de saisie de documents).
Durant cette phase, le pharmacien concerné est convoqué et auditionné (le cas échéant en présence de son avocat, qui ne peut cependant pas s’exprimer à la place de son client).
En cas de plainte, plutôt que de lancer une instruction, le Bureau du Conseil provincial peut aussi décider d’initier une tentative de conciliation entre les parties lorsque cela s’avère pertinent. Si la conciliation aboutit, un procès-verbal de conciliation est rédigé et signé par toutes les parties ; si la conciliation n’aboutit pas, la procédure disciplinaire reprend son cours habituel.
Au terme de l’instruction, l’instructeur fait son rapport au Conseil provincial. Celui-ci peut prendre plusieurs décisions, qui doivent toutes être motivées :
- le classement sans suite s’il estime qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments permettant d’incriminer le pharmacien ou tout simplement qu’il n’y a pas d’infraction à la déontologie. La procédure s’arrête alors ici, à moins qu’un appel ne soit interjeté par le Conseil national contre la décision de classement sans suite.
- la demande d’une enquête complémentaire, s’il considère qu’il n’a pas suffisamment d’éléments pour fonder une décision dans un sens ou dans l’autre.
- le renvoi au fond s’il juge que des poursuites disciplinaires sont effectivement nécessaires.
c) Phase 2 : poursuite
La décision de renvoi au fond de l’affaire marque le début d’une nouvelle phase dans la procédure disciplinaire. La phase d’instruction se termine et fait place à la phase de la poursuite disciplinaire, qui est une véritable procédure juridictionnelle.
Le pharmacien est convoqué à l’audience au cours de laquelle sera traité son affaire et peut consulter le dossier disciplinaire jusqu’à cette date.
L’audience se tient à huis clos et permet d’entendre le pharmacien et la plaidoirie de son avocat s’il se fait assister par un conseil. Le pharmacien ayant le droit d’être jugé par un tribunal impartial, le membre du Conseil et le magistrat qui ont réalisé l’instruction ne peuvent pas faire partie du siège qui prendra la décision le concernant.
À l’issue de l’audience, les débats sont clos et l’affaire est prise en délibéré. Le Conseil provincial peut décider d’acquitter le pharmacien en considérant qu’il n’a pas commis la faute déontologique qui lui était reproché ; il peut à l’inverse le condamner à une sanction disciplinaire.
d) Recours
Un appel peut être interjeté contre la décision du Conseil provincial dans le mois de la notification de la décision auprès du président du Conseil provincial, qui transmettra le dossier pour examen au Conseil d’appel. Le pharmacien lui-même peut faire appel. Le président du Conseil national dispose également, conjointement avec le magistrat assesseur du Conseil national, d’un droit d’appel contre toutes les décisions disciplinaires qui sont rendues en première instance.
La procédure devant le Conseil d’appel est sensiblement identique à ce qu’il se passe en première instance, à la différence que l’audience qui se déroule devant ce Conseil est publique. Le Conseil d’appel peut aussi soit décider de l’acquittement du pharmacien, soit lui infliger une sanction disciplinaire.
Dans un délai de deux mois, le pharmacien et/ou les président et magistrat du Conseil national ont la possibilité d’introduire un pourvoi en cassation contre la décision rendue par le Conseil d’appel. La cassation ne constitue pas une véritable troisième instance, puisqu’elle se prononce uniquement sur les points susceptibles de constituer une violation de la loi ou une violation des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité.
Si la Cour de cassation fait droit aux arguments présentés devant elle, elle peut casser la décision rendue par le Conseil d’appel. Dans ce cas, l’affaire est renvoyée devant ce même Conseil d’appel, qui devra se prononcer à nouveau sur l’affaire, étant entendu qu’il devra être composé différemment et qu’il sera tenu par le point de droit sur lequel la Cour de cassation a rendu sa décision.
e) Sanctions disciplinaires et communication des décisions
Les instances disciplinaires peuvent prononcer les sanctions suivantes : l’avertissement, la censure, la réprimande, la suspension du droit d’exercer la profession pour une période qui ne peut être supérieure à deux ans ainsi que la radiation du tableau.
Au-delà de l’avertissement, le pharmacien sanctionné ne pourra plus se présenter aux élections pour devenir membre d’un conseil de l’Ordre des pharmaciens et, dans certains cas, ne pourra pas devenir maître de stage. En cas de suspension ou de radiation, le pharmacien ne peut plus exercer sa profession et s’il exerce en officine, il ne peut plus s’y trouver.
La sanction est choisie librement par le conseil disciplinaire concerné, sans qu’il y ait un lien nécessaire entre un type de comportement spécifique et une sanction.
Toute décision définitive prise à l’encontre d’un pharmacien est communiquée au Ministre de la Santé et en cas de suspension ou de radiation, elle est également communiquée à la Commission médicale provinciale, à l’INAMI et au Procureur du Roi.
f) Effacement et réhabilitation
Les sanctions d'avertissement, de censure et de réprimande sont automatiquement effacées du dossier du pharmacien concerné 5 ans après leur exécution, à condition qu'aucune nouvelle sanction disciplinaire n'ait été encourue pendant cette période.
Pour les sanctions plus sévères que sont la suspension et la radiation, le pharmacien pourra, sous certaines conditions, demander la réhabilitation respectivement 6 et 10 ans après leur exécution, à la discrétion du Conseil d'appel.
L’effacement ou le rétablissement sera toujours notifié au Conseil provincial où le pharmacien concerné est inscrit. Cela a pour effet de supprimer les effets de la sanction pour l'avenir.